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Germaine & Henri :

"Les veilleurs"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Première rencontre entre Arthur et Germaine de Picou-Sinbrac :

 

 " ... Arthur entra dans la propriété et tomba sur une dame d’une soixante-dizaine d’années qui s’affairait à tailler un rosier grimpant rouge, dont les longs rameaux fleuris montaient sur des gloriettes et des treillages fixés sur tout le mur de l’entrée.

Elle se retourna vers le vieil éphèbe qui avait pris un air faussement perdu, et sécateur à la main gauche, se rapprocha pour lui demander ce qu’il cherchait. Soudain elle s’immobilisa net, posant sur Arthur ses yeux fixes et gris. Elle paraissait sous l’emprise d’une image personnelle que semblait lui évoquer la présence du jeune inconnu..."

 

 

Une étrange vieille dame ...

 

" ... De manière instinctive, Arthur posa discrètement ses yeux sur son autre main pour remarquer qu’elle était légèrement atrophiée. Il les releva  et tomba sur le regard de Germaine. Subitement gênée, elle tentait plus ou moins de dissimuler sa main du mieux qu’elle le pouvait. D’une voix tombée dans les graves, elle murmura :

—J’ai une atrophie des éminences thénar et hypothénar…

—Qui sont ? l’interrogea Arthur d’une voix aussi embarrassée que son interlocutrice.

—Les deux groupes de muscles les plus importants de la main… C’est grâce à leur utilisation que les magiciens réalisent l’empalmage.

Arthur haussa les épaules en signe d’ignorance.

Pour toute réponse, elle reposa le moulin à café sur la table puis lui exhiba sous toutes les coutures, sa main gauche valide, vide de tout objet.

—L’empalmage consiste à dissimuler un petit objet dans la paume de la main afin de mieux le faire apparaitre…

Soudainement une pièce de monnaie ancienne dorée fit son apparition entre le pouce et l’index de Germaine… avant de repartir dans le monde invisible d’où elle venait :

—…ou disparaitre.

Elle tourna à nouveau sa main dans tous les sens afin de bien montrer que la pièce avait complètement disparu. Arthur était ébahi par ce tour de passe-passe. Il applaudit des deux mains Germaine qui retrouva son sourire initial :

—Quelle illusionniste !

—Qui vous dit que c’est une illusion ? fit-elle en récupérant le moulin à café pour le poser en face d’elle.

—Vous parliez vous-même d’empalmage et de dissimulation…

—Vous savez Arthur, quelquefois les tours d’illusion sont là pour dissimuler la véritable magie... "

 

 

 

Première rencontre entre Arthur et Henri Sinroc :

 

 " ... Soudain quelqu’un frappa lourdement sur la vitre de ma portière.

Tout en sursautant, nous nous tournâmes pour voir une belle moustache grise posée sur le visage buriné d’un vieux monsieur qui se tenait là. D’un bleu-gris perçant, ses iris irradiaient les mystères de la race bourguignonne. Nous avions à faire ici à un pur produit du terroir, à un veilleur éduen de premier choix ! Vu les rides dessinées sur sa peau écorcée, cet arbre humain devait avoir au bas mot, deux mille ans ! Il tenait un long bâton faisant office de canne, au pied duquel se tenait un chien blanc de taille moyenne.

De sa grosse main gauche aux doigts noués, il me fit signe de baisser ma vitre.

Je m’exécutai.

—B’jourrr m’sieur, vous cherrrchez quet’ chose ?

Il avait un parler ferme et assez vif et roulait les « r Â» de manière délicieuse... "

 

 

 

 Histoire de sanglier ...

 

"... Cette fois-ci la bête cessa de manger. Elle se tourna vers le vieil éduen qui plus que jamais, avait l’allure d’un druide des temps anciens. Cette vision archaïque et vivante de l’homme et de l’animal, nous impressionna fortement. Nous avions le souffle coupé par cet événement qui surpassait en puissance, tout ce qu’on avait pu voir jusqu’ici depuis que nous nous étions jeté dans cette étrange aventure. Peut-être n’étions-nous pas au bout de nos surprises ?…

L’animal se laissa approcher jusqu’à un mètre de distance. Au fur et à mesure qu’Henri s’était avancé vers lui, son grognement  Ã©tait devenu plus rauque mais aussi plus saccadé.

Un fascinant face à face, dont l’issue pouvait s’avérer fatale, se tramait dans les ténèbres angoissantes. Je voulus parler à mon voisin, resté tout comme moi en arrière, mais ma voix me resta bloquée dans la gorge. J’étais tétanisé par l’enjeu.

Henri se remit pour une troisième fois à genoux. Lentement, il déplia sa main droite vers le  Sus scrofa qui restait étrangement immobile. Il devait avoisiner les un mètre dix au garrot et dépasser les cent trente kilos. Sa hure triangulaire était bien plus grosse que la tête du vieil homme qui n’en paraissait nullement impressionné. C’était visiblement un mâle.

Ses solides défenses sortant de sa gueule et se recourbant jusque dessus son groin, en attestaient. Son pelage dru se mit à frémir légèrement à l’approche de la main humaine sur lui. Les poils de nos avant-bras eurent un tremblement similaire. Toute la vie nocturne de la forêt sembla se figer dans ce geste insensé. Un pacte extraordinaire et surnaturel se signait là, devant nos yeux ébahis…

Enfin, la vieille main dont les doigts ressemblaient à des branches en miniature, se posa délicatement sur le dos du sanglier. Roquet qui était assis à mes pieds et qui suivait la scène avec le même intérêt que nous, poussa un léger glapissement.

Je le rassurai avec une caresse, tout en ayant le regard rivé sur son maître.

Ce dernier baragouina quelques mots incompréhensibles dans une langue rocailleuse qui eurent pour effet de faire s’éloigner calmement le sanglier, sous nos regards stupéfiés... "

 

 

 

 

 

 

 

Henri Sinroc

vers la quarantaine ... 

(Photographie retrouvée dans sa maison)

 

Germaine de Picou-Sinbrac 

( Peut-être un an avant sa rencontre avec Arthur)

« A minuit…

Dans les bois, les prairies…

Nous on pleure, on danse, on rit…

Nous on pleure, on danse, on rit…

 

Avec le bel… le bel… le Bel Enos

Du sombre au clair

Du gris au vert

Devenons fous…

Fous… Fous…

Du Bel Enos ! Â»

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